Dossier de presse / Texte
samedi, 30 septembre 2017

‘Réduire l’objet pour s’en saisir’

Laurent Rabier s’approprient des images du réel, généralement puisées dans les médias, qu’il dissèque et reconstruit grâce à une utilisation précise de plusieurs techniques ; la sculpture comme première étape , puis la photographie et enfin la peinture.

Laurent Rabier s’intéresse à la connaissance de notre actualité avec beaucoup d’objectivité de telle sorte que les œuvres ne s’embarrassent pas de charge narrative. Libre au regardeur de définir son point de vue sociologique, psychologique ou même artistique. Niant toute métaphysique où le présent n’existe réellement que lorsqu’il est l’objet d’une appréhension en acte, l’artiste construit et l’objet est là, dessiné avec la précision du cliché photographique, doté d’une signifiance universelle. Laurent Rabier réalise avec exactitude un objet, un espace en trois dimensions, miniaturisés sous forme de maquettes construites avec des emballages en carton, retravaillés ou non. Certains sont identifiables au premier regard puisqu’il s’agit de boîtes de médicament que notre pays consomme avec frénésie. Ces boîtes, qu’il utilise comme matériaux des constructions dans ses architectures d’objets fondées sur des modes de constructions comparables à ceux de l’architecture industrielle, présentent aussi un intérêt visuel, un code graphique, proche de l’esthétique Bauhaus. Leurs codes de couleurs, proches des couleurs primaires, notamment le bleu et le jaune sont les couleurs initiales des emballages, choisies par les laboratoires pour leur attrait et leur sobriété. Elles sont également un moyen pour lui d’évoquer l’individu sans le montrer pour ne garder du réel que son enveloppe tout en suscitant la conscience.

De ces multiples maquettes vont naître des peintures que l’artiste aura au préalable prises en photographie afin de capter la meilleure lumière et le meilleur angle. Le cadrage choisi avec l’appareil photo sera ensuite agrandi à l’œil nu et reproduit sur la surface de la toile de sorte à donner vie à ces ’des-constructions’ comme l’artiste les nomment et qui constituent l’étape charnière du processus. A ce moment-là, s’organise avec rigueur et bonheur,la composition picturale aux multiples fragments, œuvre finale livrée au regardeur.

L’utilisation de plusieurs médiums permet à l’artiste d’opérer dans une sorte de transdisciplinarité qui lui offre ce passage d’une technique à l’autre, cet entre-deux indispensable à l’art, faisant ainsi coexister des temporalités irréductibles. Cette manipulation ouvre les possibilités permettant de ne pas reconnaître l’identité comme acquise et définitive. Ce phénomène de glissement fait osciller le regard entre théâtralité et planéité, entre mise en scène d’un environnement fictif et représentation réaliste d’une maquette d’architecture.

Si l’œuvre de L.R mêle plusieurs techniques, elle traverse aussi plusieurs mouvements artistiques du Xxième siècle. Futurisme, cubisme, nouveau réalisme, pop art, autant de courants qui nourrissent un travail poussé par un élan fantasmatique et une action concrète, dont la pensée positive et utopiste est intrinsèquement liée à l’architecture. Cette conception dynamique de la peinture, dont les valeurs esthétiques et sociologiques se caractérisent à travers une civilisation urbaine et technologique, prise entre vitesse du futur et difficulté de se défaire du passé, définit une nouvelle objectivité et une nouvelle dynamique plastique, incommensurable à aucune autre œuvre d’art. Laurent Rabier pratique un ‘principe de réalisme qui lie la réflexion sur les structures de la réalité à la libération de la capacité d’intervenir dans la réalité’.

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